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La
mine de Trepca
La mine
de Trepca a fourni aux musées et aux collectionneurs du monde entier
des spécimens exceptionnels de divers minéraux, notamment
vivianite, ludlamite, jamesonite, pyrrhotite, arsénopyrite, dolomite,
et plus communément de très belles blendes marmatites.
Cest un géant qui pèse 60 millions de tonnes de minerai
contenant 5 millions de tonnes de plomb et zinc métal. Bien quaucune
fluorine ny ait encore été découverte (contrairement
à son cousin de Russie - Dalnegorsk), le triste sort qui frappe
ce gisement célèbre, depuis 1990 et la guerre du Kosovo,
justifie largement de lui accorder une page du site.
1) Un
peu dHistoire
Un peu plus
dhistoire quà lordinaire est nécessaire
pour comprendre limbroglio éthno-politico-économique
qui entoure la mine ; on sinterdira pourtant (provisoirement) de
donner trop de foi aux différents sites Internet passionnés
qui prolifèrent, tant chaque élément cité
sans grande vérification par nous sur Spathfluor.com peut devenir
une pièce du puzzle revendicatif, manipulée par chaque partie
à son profit, à tort ou à raison. Cette Histoire
de la mine et de sa région est pourtant passionnante.
Lexploitation dor et dargent par les Romains est attestée
par des textes et par des tas volumineux de scories pour de nombreux gisements
dans les Balkans, tant au Nord-Ouest de Trepca (Srebrenica) quau
Nord (Rudnik, Socanica) et au Sud (Gracanica). Par la suite, la région
de Trepca subit des influences ethniques, colonisatrices et/ou politiques
successives diverses, notamment des courants de populations byzantines,
bulgares, serbes, turques et albanaises qui expliquent les mélanges
de cultures, les revanches à prendre, et font (un peu) comprendre
limbroglio actuel.
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Serpentines
et bassin tertiaire de la vallée de lIbar
Photos Jean Feraud ©
2004
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Le
Moyen Âge
Pour
Trepca, la première phase dextraction attestée à
ce jour est médiévale (pour argent, plomb et fer) ; elle
démarre en 1303 et lactivité est intense. Cette productivité
répond aux besoins des seigneurs successifs et du suzerain serbe,
pour leurs activités de guerre ; cest elle qui finance la
construction de forteresses le long de la vallée de lIbar
contre la menace ottomane. Il semble que la mine a employé des
chefs mineurs saxons. Le 15 juin 1389 se produit à une douzaine
de kilomètres au sud de Trepca la fameuse bataille du Champ des
Merles : larmée serbe est écrasée par les Turcs
dans la plaine de Kosovo. Mais les historiens ne notent pas dinterruption
dans la production de la mine, car il semble dabord quune
sorte de protectorat ottoman sétablit, et que la seigneurie
dont dépend la mine (Shala e Bajgorës) conserve une certaine
indépendance (on sait quun contrôleur des mines turc
sinstalle à la mine de Gluhavica près de Novi Pazar).
Les superviseurs turcs sen prennent aux représentants des
propriétaires de la mine et sefforcent dempêcher
les exportations dargent. Lextraction est dabord désorganisée
suite à la gestion anarchique et à la fuite de la main duvre
qualifiée ; mais elle est remarquablement reprise en main par ladministration
ottomane à partir de 1455, date de la conquête totale des
Turcs sur les dernières provinces restées indépendantes.
Ils améliorent le code minier serbe et exploitent activement Trepca
et les autres mines pour alimenter leurs fabriques de monnaie et leurs
arsenaux, jusquen 1685. Cette année-là marque le début
dune récession complète dans les mines des Balkans,
paralysant rapidement aussi les fameuses mines dor, argent et plomb
de Novo Brdo.
Selection
Trust
Trepca ne refait parler delle quen 1925 avec le lancement
dune campagne de prospection par la compagnie britannique Selection
Trust qui identifie le formidable potentiel du gisement et qui crée
en 1927 à Londres une filiale « Trepca Mines Limited »
; celle-ci ouvre en 1930 la mine de « Stan Trg », sur le site
de lancienne exploitation médiévale à ciel
ouvert. Ce nom est une déformation, par ladministration britannique
de la mine, du toponyme Stari Trg qui signifie « vieille place »,
« ancien marché ». La dactylo qui a frappé les
actes institutifs de la concession a-t-elle mal lu le « ri »
de la note manuscrite de son chef, et tapé par erreur un «
n » ? Chose assez incroyable, la coquille manifeste ne sera corrigée
dans aucun document ultérieur, ni même sur les plans de la
mine, ni dans la publication historique de C. Forgan au congrès
géologique international de 1948. Soit les concessionnaires navaient
pas une grande connaissance de la langue locale, soit leurs représentants
sur place ont pensé sage de garder le silence et de ne pas créer
un vice de forme juridique dans les documents officiels (qui aurait peut-être
entaché la bonne propriété du titre minier ou risqué
de perturber les actionnaires !). Le géologue F. Schumacher moins
inquiet (puisque Tito venait de confisquer la mine à Selection
Trust) rectifiera le nom dans son mémoire de 1950.
La
mine atteint rapidement une cadence dextraction de 600 à
700 000 t/an. De 1930 à 1940, elle fournit 5,7 Mt de tout venant
produisant dans lusine de flottation sur place 625 000 t de concentrés
de plomb, 685 000 t de concentrés de zinc, 444 000 t de concentrés
de pyrite et un concentré mixte de cuivre et plomb. Une fonderie
de plomb est établie à Zvecan en 1940. Pendant la guerre,
Trepca est exploitée par un société appartenant à
Goering lui-même et elle alimente notamment les U-Boote en batteries
! Après la guerre, lensemble mine-fonderie est nationalisé
par Tito.
Rudarsko
Metalurski Hemijski Kombinat Olova i Cinka Trepca
Le Combinat Minier, Métallurgique et Chimique de Plomb et Zinc
de Trepca va alors devenir lun des plus importants complexes
miniers des Balkans et il regroupe différentes mines : au Nord
(dans les Monts Kopaonik) Crnac et Belo Brdo (dont le minerai est
traité à la laverie de Leposavic), Koporic et Zuta Prlina
qui sont en exploration ; au centre, Stari Trg et la laverie de Tuneli
i Pare ; au Sud et Sud-Est (vers Pristina) Artana-Novo Brdo, Hajvalija,
Kisnica-Badovac avec la laverie de Gracanica. Lensemble a produit
le chiffre astronomique de 60,5 millions de tonnes de minerai tout-venant
à plus de 8 % Pb+Zn, dont la moitié rien quà
Trepca. Cest un des plus grands districts Pb-Zn dEurope,
avec un tonnage métal produit de près de 3 Mt de plomb
et 2 Mt de zinc. On estime sa production dargent à plus
de 4500 t. Ses réserves géologiques sont aujourdhui
considérables, même si les chiffres avancés naguère
sous économie dirigée doivent être aujourdhui
repassés au crible des critères de rentabilité
et de léconomie de marché. |
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Leffondrement
Ce combinat qui employait 20 000 personnes et produisait 70 % des revenus
de lindustrie minérale de toute la Yougoslavie (Slovénie
donc incluse) sest progressivement effrité ces quinze dernières
années, dabord par vieillissement des installations, défaut
de maintenance, manque de réparations et de réinvestissement,
absence de contrôle de la production et des teneurs, vols de matériel
voire dinstallations. Des tentatives de privatisation restèrent
sans grande suite. La chute sest accentuée à partir
de 1990 avec l'abrogation par Belgrade de lautonomie du Kosovo,
la tension politico-éthnique croissante et le départ des
travailleurs dorigine albanaise. Pendant la guerre du Kosovo qui
suivit 1998, Trepca et Kosovska-Mitrovica où la population était
très mélangée ont été parmi les enjeux
les plus âprement disputés ; le bruit a même couru
que des centaines de cadavres kosovars auraient été grillés
dans le four de la fonderie de plomb (mais les enquêtes de la police
française nont trouvé aucune preuve).
Larrivée de la KFOR et la séparation des belligérants
en juin 1999 ont conduit à un éclatement du combinat. Les
mines du Nord restent exploitées par les Serbes. Celles du Sud
qui avaient été noyées ont été reprises
en main par les travailleurs dorigine albanaise mais ils nont
pu encore les remettre en production. Au centre, la KFOR avait dabord
encouragé la reprise de la production de Trepca et de Mitrovica.
Mais une évaluation environnementale franco-danoise des sites révéla
une telle accumulation de substances polluantes au niveau des fonderies
que ladministrateur civil Bernard Kouchner ordonna la suspension
immédiate des opérations en août 2000. Désormais
Trepca est en grande partie noyée et ses deux fonderies, arrêtées,
sont dans un triste état. Les revendications sur la propriété
juridique de la mine fusent de tous côtés, jusquaux
britanniques qui réclameraient une indemnisation de leur nationalisation
par Tito.
Comble du destin, le bruit couru que, le 18 septembre 1999, le musée
minéralogique de la mine où sétaient accumulés
depuis 1966 des trésors jalousement gardés, aurait été
pillé par des voleurs profitant de la confusion avant l'arrivée
de la KFOR. Nul doute que, en pareil cas (comme pour le musée archéologique
de Bagdad) les pièces volées ne soient disparues à
jamais dans les caves de commanditaires privés sans scrupule. Dans
une dépêche, le professeur Milan Jaksic de lEcole des
Mines sur place a signalé que le plus inestimable spécimen
de vivianite du musée avait disparu, de même que plus de
1500 des cristaux collectés dans la mine depuis 1927, et 150 spécimens
qui avaient été donnés par 30 pays du monde entier
(Puisse chaque musée du monde
être en alerte contre toute tentative de revente par les receleurs...
sous réserve de vérification de l'information).
Au passage
hélas, les petits collectionneurs apprécieront
eux
qui se souviennent de la surveillance policière qui entourait la
mine dans les années 70 et qui jetait une chape de « plomb
» (cest le cas de dire) sur presque toute possibilité
de sortir le moindre spécimen un peu chouette du carreau, et encore
plus sur lachat de minéraux dans le village ! Mais la direction
de la mine nous a fait savoir fin 2004 que (grâce à l'interposition
efficace de l'UCK) le pillage a été évité
à temps, et que le musée est intact.
Heureusement, des espoirs de reprise de la mine sont maintenant permis.
La mission des Nations Unies au Kosovo (MINUK, en anglais UNMIK)) qui
gère provisoirement cette province, a lancé avec lapprobation
de toutes les parties un important programme dévaluation
technique et économique dune reprise de lexploitation
des divers sites industriels du combinat. Ce programme a été
confié en août 2000 au consortium ITT (Interim Team for Trepca)
qui comprend les américains Morrison & Knudsen-Washington Group,
Boliden Contech, et TEC Ingénierie, société française
du groupe Eramet.
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Blende,
Rhodochrosite, Arsenopyrite et Calcite
Coll. Jean Feraud
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Blende
marmatite
cristaux de 3 cm darête
Coll. Jean Feraud
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Pseudomorphose
pyrrhotite-marcasite, calcite
Coll. Jean Feraud
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2) Géologie
La géologie
de la mine est très originale. Elle pourrait ne pas avoir encore
livré tous ses secrets, dautant que depuis les études
du géologue de Selection Trust C. B. Forgan (reprises par F. Schumacher
en 1950), extraordinairement fines pour lépoque, il na
été vraiment « publié » jusquici
aucune monographie très illustrée et bien documentée
sur ce monstre géologique. Pourtant, dans lintervalle, lenracinement
vertical reconnu du gisement a doublé ! Toutes les publications
parues sont soit des synthèses interprétatives de la métallogenèse
du gisement ou de celle de la zone du Vardar (S. Jankovic), soit des guides
ou des comptes-rendus sommaires de visite de congrès, soit des
publications pointues mais portant sur un point particulier, comme les
datations stratigraphiques de Kandic et coll. (1973) interprétées
de façon hardie par Ivo Strucl (1981).
Un piège pour 60 Mt de minerai
Au sein de la chaîne alpine des Dinarides, la mine est située
dans la zone du Vardar, une nappe de terrains plissés, écaillés
et charriés qui comprend un socle dâge primaire, une
couverture sédimentaire jurassique et des ophiolites crétacées
charriées, intrudée au Tertiaire par des magmas post-tectoniques
(granodiorite et laves dacitiques et andésitiques). Le gisement
est interstratifié sous forme dun manto et de skarns dans
une pile sédimentaire de terrains paléozoïques (la
Série de Stari Trg), sous une épaisse couche (ignimbrite
?) de tufs volcaniques tertiaires. Plus précisément, dans
la Série de Stari Trg, les amas minéralisés sont
situés à linterface entre (à la base) dépais
calcaires marmorisés et (au sommet) des schistes épais :
contact stratigraphique qui est occupé de place en place par une
couche de quartzites dune dizaine de mètres, boudinée,
qui sintercale sporadiquement. Ce contact est ployé en une
charnière anticlinale dont laxe NW-SE plonge de 40° vers
le NW. La structure se complique quand on ajoute quil se trouve
quune cheminée volcanique (brèche dexplosion
de section ovale de 100 x 200 m avec au cur un pipe de trachyte
ou de dacite) sest intrudée tout le long de la crête
de cette charnière anticlinale, au contact précisément
des schistes et du calcaire. Cest elle qui (fondamentalement) contrôle
la présence de la minéralisation. Le minerai sest
insinué seulement ou presque dans linterface schiste/calcaire,
de part et dautre du « pipe » volcanique. Il atteint
30 à 60 m dépaisseur en moyenne. Il y a aussi quelques
corps minéralisés discordants. Il y a aussi au voisinage
de la mine de plus petits prospects du même type que Stari Trg.
(voilà, cest dit et pourtant on simplifie beaucoup).
La montée de la granodiorite miocène des Monts Kopaonik
au voisinage na certainement pas été sans influence
métallogénique aussi. Cest le magma qui est responsable
de la formation des skarns à grenat, pyroxène, amphibole
et magnétite dans les corps minéralisés, et de la
présence de filons de dacite ou dolérite dans les roches
encaissantes. Dans celles-ci, lhydrothermalisme minéralisateur
sest accompagné de propylitisation-séricitisation,
silicification, carbonatation et dun développement de pyrite
et kaolinite.
La
genèse du géant est simple !
Les scientifiques
rangent le gisement dans le type hydrothermal (méso- à épi-)
pour la plus grande partie, et métasomatique localement (pour la
partie skarn). A la suite danalyses isotopiques, ils accordent une
grande influence à des intumescences thermiques et structurales
liées à une fusion au niveau de la base de la croûte
et du manteau supérieur. Néanmoins, le dépôt
du minerai survînt au stade subvolcanique et à faible profondeur.
Son âge est miocène.
Le collectionneur se réjouit que, à lépoque
alpine, des eaux se soient infiltrées dans les terrains, puis réchauffées
et chargées de métaux au contact des venues magmatiques
et des fluides qui montaient de la zone de fusion des plaques en profondeur.
Ces eaux étaient ensuite bloquées dans leur remontée
par le toit imperméable des épais schistes. Grâce
à leur température et à leurs propriétés
chimiques agressives, elles ont alors creusé par simple dissolution,
dans les calcaires sous ce toit faisant écran, de vastes cavités.
La cristallisation fractionnée des éléments en solution
a tapissé ces cavités de concrétions au fur et à
mesure et, si un vide résiduel le permettait, de cristaux gigantesques.
De ce point de vue, la classification gîtologique de Trepca telle
quelle est indiquée dans les bases de données sur
Internet nest pas complète : il faudrait aussi parler de
« karst » (même si ce fut à chaud) et de «
gisement sous inconformité ».
Avons nous ainsi fait le tour de la formation du géant Trepca ?
Non. Nous avons déterminé les conditions de dépôt
du minerai (dissolution de cavités karstiques remplies au fur et
à mesure par des solutions chaudes utilisant le piège hydrogéologique
idéal local ; skarn contrôlé par une cheminée
volcanique). Nous avons défini les conditions de transport
des substances minérales (solutions hydrothermales circulant dans
un système de tuyauterie complexe). Mais pour la source des
éléments (qui est le point de départ de lhistoire)
nous avons indiqué un origine vague : le magma. Dans la mesure
où il sest usuellement formé, dans les chaînes
ophiolitiques de ce type, des amas sulfurés volcanosédimentaires,
peut-être y en a til un en profondeur, qui expliquerait lorigine
de cette concentration en métaux exceptionnelle ? Espérons
que les experts des universités venus travailler sur la région
sauront répondre dans un proche avenir aux points obscurs qui subsistent
!
Et
si
?
Ce serait trop simple de passer sous silence quen fait de polarité
des terrains, on ne sait pas trop si les calcaires sont antérieurs
aux schistes ou si cest le contraire. En effet, on a toujours pensé
que la Série sédimentaire de Stari Trg était dâge
Silurien-Ordovicien mais les géologues yougoslaves y ont trouvé
des Conodontes fossiles (Aleksandar Topalovic, comm. orale à la
mine, 1973) qui suggèrent quune partie des calcaires pourrait
être du Trias, donc que le supposé dessous serait le dessus
de la pile stratigraphique ! Comment sy retrouver dans cette zone
daffrontement torturée entre la plaque africaine et la plaque
eurasienne ? Au lieu danticlinal, les puristes parleront donc prudemment
dantiforme. Et les amateurs de métallogénie globale
rêveront à la suite dIvo Strucl en se disant que, si
les calcaires sont triasiques, alors Trepca est un jalon (à quelques
variantes près, notamment le rôle des magmas tertiaires)
des mêmes processus minéralisateurs qui ont donné
naissance tout le long des Alpes aux gisements stratiformes de Mezica,
Raibl, Salafossa, La Plagne, Largentière, Les Malines etc. (là
on rêve éveillé mais cest bien le rêve
qui fait avancer la science).
A loreille des collectionneurs, on « instillera » aussi
quà ce jour aucune des stalactites de carbonates minéralisées
en sulfures trouvées à Trepca na présenté
de canalicule axial pour lécoulement des gouttes qui perlent
usuellement au plafond des cavités, ce qui indique que le karst
était totalement noyé et que les géodes nont
pas été tapissées à lair libre par les
sulfures, mais sous tranche deau (plus ou moins chargée en
sels minéraux). Donc, informez nous svp si vous trouvez un compte
gouttes dans votre échantillon ! car ce serait un scoop.
3)
Minéralogie
Le site Internet Mindat.org
a listé 30 espèces valides. Les publications spécialisées
(en serbo-croate) compilées dans Mari (1979) indiquent aussi, outre
les minéraux doxydation classiques omniprésents, quelques
autres espèces remarquables. On décompte ainsi plus de 60
minéraux à ce jour (par ordre alphabétique) :
Actinolite
Anglésite
Ankérite
Aragonite
Arsénopyrite
Barytine
Bismuth natif
Bornite
Boulangérite (dont la var. plumosite)
Bournonite
Calcédoine
Calcite (dont la var. manganocalcite)
Cérusite
Chalcanthite
Chalcophanite
Chalcopyrite
Childrénite
Chlorite
Coronadite
Cosalite
Covellite
Crandallite
Cubanite
Diopside
Dolomite
Enargite
Epidote
Falkmanite
Galène
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Grenats
Gypse
Hédenbergite
Hématite
Illite
Ilvaïte
Indium
Jamesonite (dont la var. plumosite)
Limonite
Löllingite
Ludlamite
Magnétite
Marcasite
Mélantérite
Melnikovite
Or natif
Psilomélane
Pyrargyrite
Pyrite
Pyrrhotite
Quartz
Rhodochrosite (dont la var. riche en fer oligonite)
Scheelite
Sidérite
Smithsonite
Sphalérite (var. marmatite)
Stannite
Stibine
Struvite
Tennantite
Tétraédrite
Thallium
Vallériite
Vivianite
Wollastonite. |
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Plumosite,
rhodochrosite, calcite, arsenopyrite
Coll. Jean Feraud
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Sphalerite:
5 cm diam, calcite, dolomie
Coll. Jean Feraud
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Galene,
sphalerite (1 cm), arsenopyrite,
rhodochrosite, calcite & pyrite -Coll. Jean Feraud
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Marmatite
7 cm (mâcle du spinelle)
Coll. Jean Feraud
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Arsenopyrite,
calcite xx 3 cm
Coll. Jean Feraud
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Quartz
& calcite 15cm
Coll. Jean Feraud
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Au point de vue muséologique, plusieurs de ces minéraux
sont de qualité exceptionnelle. La blende marmatite, noire, est
le plus souvent en octaèdres, avec des faces striées et
parfois la macle du spinelle. Les cristaux peuvent atteindre 7 voire 10
cm de diamètre, mais la moyenne ne dépasse pas 2 à
3 cm. Ils sont généralement associés à la
cristallisation de calcite. Une étude récente par des chercheurs
slovènes et allemand a montré que les plans de macle [111]
de cette blende sont appauvris en S et enrichis en O, Mn, Fe et Cu. La
saturation en cuivre provoque la formation de minuscules cristaux de chalcopyrite
dans ce plan. La pyrrhotite est remarquable par ses formes en rosettes
atteignant 16 cm de diamètre, surtout si elle nest pas pseudomorphosée
en pyrite-marcasite. Assez rarement elle est pseudomorphosée en
galène. La galène en cubes et octaèdres atteignant
5 cm darête se rencontre avec un habitus typique, comportant
souvent des faces et des arêtes corrodées et des structures
daccroissement concentriques évoquant un début de
fusion (« galène coulante » des auteurs germanophones).
Larsénopyrite forme souvent de très beaux cristaux
à allure tabulaire, ou au contraire des prismes courts à
faces [012] losangiques aplaties ; les cristaux atteignent 5 cm, mais
la plupart des collectionneurs se contentent de quelques millimètres
! La vivianite na pas les dimensions des cristaux du Cameroun mais
elle forme des prismes aplatis allant jusquà 7 et même
une douzaine de centimètres de haut et 2 cm dépaisseur.
Elle est dun vert très profond. La ludlamite, vert pomme,
plus rare, est encore plus recherchée. La boulangérite se
présente en masses duveteuses de fins cristaux enchevêtrés
désignées sous le nom de plumosite ; certaines aiguilles
atteignent 30 cm de long. La jamesonite est plus rare mais le musée
de la mine en présentait un spécimen où les cristaux
atteignaient 4 cm de long et 1,5 cm de diamètre. La chalcopyrite
et la pyrite sont plus banales.
Ce sont les combinaisons des sulfures, à éclat métallique,
avec les cristaux lustrés ou nacrés de quartz, dolomite
et calcite, et ceux roses de rhodochrosite, qui confèrent aux pièces
venant de Trepca toute leur magie pour les collectionneurs. La dolomite
forme parfois de beaux rhomboèdres de plusieurs kilos et de 10
cm darête, associés à des aiguilles de quartz.
Les prismes de quartz (blanc à hyalin) sont parfois en sceptre
et atteignent 7 cm de long.
De temps en temps, les chercheurs trouvent des espèces nouvelles
pour Trepca ; en 1995 ce fut le tour dun phosphate très rare
au monde, la childrénite (accompagnée de son minéral
daltération la crandallite). Le minéral forme des
cristaux biterminés isolés ayant jusquà un
centimètre de long, dans des aggrégats géodiques
associés aux carbonates de fer et de manganèse. Il est jaune
pâle, blanc sans éclat dans laxe et plus transparent
et brun sur les bords. La présence dinclusions de boulangérite
dans la childrénite suggère que cette dernière sest
formée dans des conditions hydrothermales de basse température.
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Blende
marmatite (xx de1 à 2 cm), galene et rhodochrosite
Coll. Jean Feraud
courtesy
of Franz Huber
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4) Exploitation
A partir
de lopen pit médiéval à la cote 935, lexploitation
sest approfondie en souterrain par la méthode des chambres
remblayées. Laccès des chantiers sest fait par
quelques travers bancs à la partie sommitale du gisement (cotes
865, 830, 795 et 760), puis, pour exploiter laval-pendage, on a
creusé un puits vertical qui dessert les autres niveaux successifs.
Les niveaux les plus profonds sont desservis par des descenderies à
partir du fond du puits. Lextension verticale totale de la mine
était au moment de larrêt de 800 m. Du puits à
la cote 605 part un travers-bancs découlement de 2,5 km de
long vers le SW. A chaque niveau les chambres dexploitation de développent
en allongement horizontal de part et dautre de la zone dintersection
de la cheminée volcanique, suivant les deux flancs de lantiforme,
sur une distance totale de 500 m environ vers le NE et 400 m environ vers
le Sud. Chaque chambre a de lordre de 70 m de large et 100 m de
long.
5)Traitement,
production
La production totale de Trepca de 1931 à 1998 est estimée
à 34 350 000 t de tout-venant à des teneurs de 6 % Pb, 4
% Zn, 75 g/t Ag et 102 g/t Bi. Le minerai était concentré
dans la laverie (flottation) de Prvi Tunel (Tuneli Pare) dont la capacité
était de 760 000 t/an. Les concentrés de plomb étaient
dirigés sur la fonderie de plomb de Zvecan (capacité 80
000 t/an), ceux de zinc sur la fonderie de zinc de Mitrovica (capacité
50 000 t/an) ; il y avait aussi une unité de production dengrais
utilisant lacide sulfurique sous-produit de lhydrométallurgie,
et des ateliers de montage et de recyclage de batteries.
Le tonnage métal produit a été de 2 066 000 t de
plomb, 1 371 000 t de zinc, 2569 t dargent et 4115 t de bismuth.
La production dor est évaluée à 8,7 t de 1950
à 1985 soit une moyenne de 250 kg/an ; celle de cadmium à
1655 t de 1968 à 1987. On a signalé aussi que des traces
de germanium, gallium, indium, thallium, sélénium et tellure
sont présentes dans le tout-venant, qui sont valorisées
au niveau fonderies.
6) Et
maintenant ?
La reprise
que tout le monde espère doit passer par les préalables
de décontaminer les usines métallurgiques, mettre en place
des procédés et procédures efficaces pour prévenir
toute pollution nouvelle, et attirer des investisseurs privés.
Le programme de mise à niveau des installations sera coûteux
(on a avancé pour lensemble du combinat les chiffres de 15
à 30 M USD). Pour la mine de Trepca il semble (daprès
les premiers calculs publiés) que les ressources restant en profondeur
en valent la peine. Le rapport ITT/UNMIK 2001 conclut que les réserves
des catégories A+B+C1/C2 se monteraient à un peu plus de
29 000 000 t de minerai tout-venant à des teneurs variant (suivant
les panneaux considérés) de 3,40 à 3,45 % Pb, 2,23
à 2,36 % Zn et 74 à 81 g/t Ag, soit en métal environ
999 000 t Pb, 670 000 t Zn et 2200 t Ag. Ceci alimenterait encore une
cinquantaine dannées dextraction si les coûts
opératoires et le marché le permettent ! Lenjeu du
sauvetage du « géant Trepca » est mobilisateur : revitaliser
toute cette région, lui redonner emplois, espoir et fierté.
Naturellement, les petits collectionneurs apprécieraient une reprise
rapide de lextraction !
7)Références
bibliographiques récentes ou incontournables
Bancroft
P. (1988) Mineral museums of eastern Europe. The Mineralogical
Record, vol. 19, n° 1, p. 44-45, 50.
Barral J.-P. (2001) Réhabilitation du combinat minier de
Trepca au Kosovo. I.M. Environnement (revue de la Société
de lIndustrie Minérale), n° 12, avril 2001, p. 6-10.
Bermanec V., Scavnicar S., Zebec V. (1995) Childrenite and crandallite
from the Stari Trg mine (Trepca), Kosovo : new data. Mineralogy and Petrology
52, p. 197-208.
Dusanic S., Jovanovic B., Tomovic G., Zirojevic O., Milic D. (1982)
History of mining in Yougoslavia. In Cuk L. editor, Mining of Yougoslavia,
11th World Mining Congress, Beograd, p. 119-140.
Féraud J. (1974) Trepca (Kosovo), compte rendu de trois
visites géologiques individuelles de la mine effectuées
en 1972, 1973 et 1974 . Rapport inédit, Lab. Géol. appliquée
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Jean
Féraud
jferaud(at)spathfluor(point)com |