|
LES MINES ET LA FINANCE :
La
propriété d'une mine peut revêtir différentes
formes. Elle peuvent appartenir à un individu, comme celles
du Roi Salomon. Elles peuvent appartenir à l'état sous
des formes juridiques diverses, comme les charbonnages. Avec l'essor
de la société industrielle une forme de propriété
s'est développée : la société par actions.
La propriété est divisée entre un nombre de personnes,
qui peut être important. Dans ce dernier cas certains ne posséderont
qu'une partie infime du capital. Leur droit de propriété
sera assez théorique. En pratique il se limitera à encaisser
les éventuels dividendes, à participer une fois par
an à une assemblée générale, à
profiter de l'éventuelle valorisation de l'action. |
SIMFLUOR
Sté Industrielle des mines de fluor
|
En France
depuis les années 80 les titres sont dématérialisés,
c'est à dire qu'ils ne sont plus représentés par
aucun support matériel. Ils existent uniquement sous la forme de
lignes dans des fichiers informatiques.
LA
BARYTINE
Société ayant exploité le gisement de Crôt
Blanc, en Grury
|
Les
titres devenus pour une raison où une autre sans valeur peuvent
être collectionnés. La collection des titres anciens
s'appelle la scripophilie. Dans les pays de langue anglaise le mot
employé est scripophily. Ces mots sont apparus dans les années
80. Pendant un certain temps le mot scripophilie a été
en concurrence avec "scriptophilie", mais l'usage a imposé
le premier. Comme pour toute collection les collectionneurs peuvent
privilégier un thème. Les titres miniers en sont un.
La collection de titres se rapportant à la fluorine pourrait
être une spécialisation à l'intérieur
d'un thème très vaste.
Un
titre se compose généralement de deux parties, qui
peuvent ne faire qu'un où être en deux parties. Le
corps du titre appelé parfois le manteau, est en fait le
titre en lui même, matérialisation du droit de propriété.
Une seconde partie est la feuille de coupons. Les coupons portent
généralement un numéro, parfois une date de
détachement. Les paiement se caractérisaient par le
détachement d'un coupon. A la jointure du corps du titre
et de la feuille de coupons se trouvait souvent le talon. Lorsque
la feuille de coupons était épuisée en échange
du talon elle était remplacée par une nouvelle feuille
de coupon. Cela s'appelait le recouponnement. Cette nouvelle feuille
était souvent collée par un bord au titre démuni
de coupons.
|
Les principaux
types de titres que le collectionneur peut avoir entre les mains sont
les actions, les obligations, les parts de fondateurs et les parts bénéficiaires.
Les actions
sont un droit de propriété sur le capital. Elles ont généralement,
mais ce n'est pas une obligation dans tous les pays, une valeur nominale.
Elle correspond généralement au montant du capital versé
à la création de la société. Il existe aussi
des actions de jouissance. La société a remboursé
le montant du capital initialement versé.
Les obligations
sont la matérialisation d'une créance. Une entreprise va
émettre un emprunt obligataire. Son montant sera divisé
et matérialisé par un certain nombre d'obligations ayant
chacune une valeur nominale correspondant à leur quote part dans
l'emprunt.
Les
parts de fondateur ont généralement été
attribuées aux créateurs, où aux premiers actionnaires.
C'étaient des titres très spéculatifs. En général
les statuts prévoyaient un certain pourcentage des bénéfices
aux porteurs de parts, sur ce qui restait à distribuer après
un premier paiement aux actionnaires et une première dotation
aux réserves. Cette participation de l'ordre de 20 à
30 pour cent, souvent 25 pouvait se révéler importante
si la société se développait car elle se rapportait
à un petit nombre de parts, qui était fixe, alors que
d'autres actions pouvaient être émises. Par contre en
période de difficultés elles passaient après
les actions. Un autre point renforçait le caractère
spéculatif. Elles n'avaient pas le droit de vote et ne pouvaient
participer à la gestion de la société. La tentation
était parfois grande pour les actionnaires de se servir généreusement
et de prendre un peu plus que leur part des bénéfices.
Pour éviter ces conflits les parts pouvaient faire l'objet
de rachats de gré à gré ou de conversions en
actions. Dans ce dernier cas il fallait l'accord de l'assemblée
des actionnaires et de celle des porteurs de parts. La loi interdit
en France la création de parts. Les seules qui existent sont
une survivance du passé. A la cote de la Bourse de Paris subsistent
deux lignes de parts alors qu'il y en a eu plusieurs centaines jusqu'à
la dernière guerre. A noter que les parts présentent
généralement une décote sur leur valeur théorique
telle qu'elle ressortirait d'un calcul basé uniquement sur
les droits aux bénéfices. L'absence de droit de vote
a un prix. |
ACIERIES de PARIS et d'OUTREAU
Société ayant exploité le gisement de Chaillac
|
SIMFLUOR
Sté Industrielle des mines de fluor
|
Les
parts bénéficiaires sont des titres aux caractéristiques
très proches de celles des parts de fondateurs. La principale
différence est qu'elles avaient souvent été créées
au cours de la vie de la société, et non à sa
création. Il s'agissait souvent d'une étape cruciale,
où la survie de cette dernière était en jeu.
Un exemple parmi d'autres possibilité est une recapitalisation
douloureuse. La société a perdu la quasi totalité
de son capital. Les seuls actifs restant sont incorporels. Les actions
anciennes devenues quasiment sans valeur peuvent être annulées,
partiellement où totalement. De nouveaux actionnaires recapitalisent
la société. Pour désintéresser les anciens
actionnaires des parts étaient parfois émises, qui pouvaient
être assimilées à une clause de retour à
meilleure fortune. Tous les cas étaient envisageables. Comme
pour les parts de fondateurs la loi française interdit désormais
l'émission de parts bénéficiaires. |
Les
mines marginales et le rêve du boursicoteur :
Si mes souvenirs
scolaires sont bon, le premier a avoir écrit sur les mines marginales
est un brillant économiste sachant apprécier avec modération
le vin du Portugal.
Prenons
un métal ou un minerai dont l'unité se négocie à
300. Pour une mine riche où le coût de production est de
200, le bénéfice par unité produite sera de 100.
Pour une mine pauvre où il est de 295, il sera de 5. Le prix de
ce métal oscille à peu près régulièrement
autour de ce prix moyen sur lequel il est centré. Les mines les
plus pauvres en exploitation auront comme prix de revient ce prix de 300.
Elles sont appelées mines marginales. Par extension cette appellation
désigne toutes les mines dont le prix de revient est proche du
prix du marché. La valeur de nos deux mines reflètera la
capacité bénéficiaire, tout en tenant compte de la
durée de vie, et de l'éventuelle prime de risque. Il est
possible de parler de la valorisation globale de la mine ou de cette même
valorisation ramenée à une action, obtenue en faisant la
division par le nombre d'action.
C'est là
que la mine marginale permet les rêves les plus fous. Imaginons
que pour nos deux mines le cours de l'action soit de 10 euros. Elles peuvent
très bien avoir le même cours au départ de notre hypothèse.
Le cours reflète la valeur de la mine et sa capacité bénéficiaire,
pondérés par son espérance de vie et ramenés
à une action.
SORPEM
Société
ayant exploité les gisements de Pic Martin (Associée
de la SIMFLUOR dans la réorganisation de Pic Martin dans
les années 60-62)
|
Que
se passe-t'il si le prix de l'unité de métal extrait
passe à 400 et qu tout indique qu'il a l'air de vouloir se
stabiliser à ce niveau. La mine riche qui gagnait 100 par unité
produite gagnera 200. La mine pauvre 105. Qui va s'enrichir. Dans
le cas de la mine riche le bénéfice par action va doubler.
Si l'on escompte une stabilisation à ce niveau le prix de l'action
va plus ou moins doubler. Pour la mine marginale le bénéfice
par action va être multiplié par 21. En même temps
certains minerais à faible teneur non rentable pour un prix
de 300, le seront à 400. Le cours peut très lui aussi
être multiplié par 21. Dans la pratique ce sera 15, pour
tenir compte du risque, mais ce sera peut-être 25 si le prix
a l'air de se stabiliser et que l'augmentation de la valeur des réserves
est prise en compte. L'effet de levier peut-être important. |
Naturellement
à la Bourse il y a deux sens. On peut très bien à
partir d'un semblant de stabilisation à 400 revenir à 300,
voire à 290 où 280.
Ce genre
de mécanisme fit rêver de nombreux boursicoteurs. Il suffisait
d'être dans le bon sens pour gagner beaucoup d'argent en quelques
mois. Naturellement ce genre de choses ne se produisait en général
que lorsque personne où presque ne s'y attendait. Pour avoir des
chances il fallait lorsque le prix était stabilisé à
un niveau bas, se constituer un portefeuille de mines marginales et avoir
la patience et les nerfs suffisamment solides pour le conserver. Les cours
de ces actions qui étaient souvent des penny stocks pouvaient en
effet varier du simple au double, puis retour à la case départ.
Il était aussi possible de chercher à prendre le train en
marche, mais gare aux faux départs.
Les
mines du rêve au cauchemar :
Les mines
suscitent le rêve, aussi bien à la Bourse que sur le terrain
où le prospecteur rêve du filon fabuleux. La face cachée
est constituée par les nombreux drames liés à la
mine. Un exemple parmi d'autres : l'Or. Il faut parfois aller chercher
ce métal à de grandes profondeurs où il se cache
sous forme de filons de faible épaisseur. La chaleur est suffocante.
Même si toutes les précautions sont prises le travail reste
dangereux. Pour un grand pays producteur dont c'était la principale
source de devises, le coût était terrible : un mort par tonne
d'or extraite. Fallait-il arrêter l'extraction, impossible tout
en prélevant un lourd tribu, la mine faisait vivre plusieurs dizaines
de milliers de personnes, et indirectement d'autres plus nombreuses encore.
Il y avait toujours la possibilité de renforcer la sécurité,
mais vu la configuration géologique arrivait un moment où
l'on ne pouvait faire beaucoup plus.
Ce coût
humain semble dramatique. Pourtant il était à une époque
bien proche dérisoire par rapport à ce que l'avenir devait
réserver à ces mineurs. Ces derniers vivaient souvent loin
de leur famille. Les hommes vivant loin de leur femme sont parfois sujets
à des tentations. Un mal terrible les guettent pour peu qu'ils
commettent quelques imprudences. De retour chez eux ils transmettent la
terrible maladie. Une véritable hécatombe frappe certaines
populations minières, sans aucune commune mesure avec certains
drames du passé .
Gisement
de fer de L'Ouenza
frontière algéro-tunisienne.
Présence de fluorine...
Du rêve
au cauchemar, il n'y a parfois pas un long chemin. Ceci est particulièrement
vrai pour les mines d'Or ou de diamants qui font souvent rêver davantage
que les autres mines. Le métal des Dieux, qui a emprisonné
la lumière du Soleil a son coté obscur fait de drames et
de souffrance. Lorsque nous avons entre les mains de vieilles actions
de mines c'est un condensé de ces drames, mais aussi des rêves
les plus fous que nous tenons.
Jean-Claude URAN
Courriel
:
jean-claude.uran@spathfluor.com
Site Internet :
J.C.Uran
|